David Foster Wallace

par Pierre Yergeau

J’aime la brutalité et l’éloquence en littérature. J’aime ces brèches qui ne sont pas calculées dans le texte, et qui font en sorte que l’on se retrouve au milieu d’un spectacle. Un peu comme ces scènes de scandale chez Dostoïevski. Les drames intrapsychiques, les discours dépressifs et les aveux. On finit par abandonner notre narcissisme et se réconcilier avec les parties les plus sombres de soi – et des autres!

Quoi que l’on fasse, les erreurs vont se multiplier. Comme dans un film de Buster Keaton.

Écrire, c’est un combat que l’on a perdu à l’avance. Je pourrais essayer de supprimer tous les mots inutiles. Je pourrais traverser l’Amérique et vous faire voir à quelle éternité vous êtes condamné. Je pourrais fermer les yeux et vous montrer comment le monde disparaît.

La mélancolie de David Foster Wallace, tout au contraire, vient de la mort des mots qui couvrent le paysage et qui pèsent comme une fatalité sur les situations les plus anodines. Je comprends cette propension à la digression et au baroque. Pour ma part, au contraire, j’ai toujours eu la manie du ciseau. Je coupe les phrases. Je les tranche. Si je pouvais, je couperais les mots. Mais j’aime bien l’étrange abandon mélancolique de Wallace.